L'EUROPE, UNE TOUR DE BABEL

 

 

 La Bible, dans son livre de la Genèse «  évoque ,d’une certaine manière, la construction européenne à de nombreux titres . Après le déluge et l’arche de Noé ,les hommes  décident  de s’unir et  d’édifier une tour dont l’objectif présomptueux est  d’atteindre le firmament » ils dirent : allons, bâtissons une ville et une tour  dont le sommet touche au ciel ( Noah XI,4).  L’édification de la tour de BABEL  ,véritable défi  d’orgueil des hommes , rappelle  d’autres édifices antiques  (  les pyramides d’Egypte)   ou modernes ( le Burj  Khalifa de Dubai, le plus haut bâtiment du monde)  . Et voici que les grandes nations de ce monde font de même lors des  rencontres internationales : Les «  sommets «  - comme celui du G 20 qui  s’est récemment tenu  à Cannes – visent  très  haut , telle cette prétention de sauver le monde de la faillite ! Les  commentateurs de la tour de BABEL affirment: les hommes vinrent  avec un même dessein : réaliser une œuvre collective. Car «  voici ,ils sont un peuple( Noah, XI,6) .Ils ont tous une seule langue ,et donc, a priori ,   la même conception  du monde  . Pourtant, au  fur  et à mesure que la tour s’élevait dans les cieux  , les hommes se comprenaient de moins en moins et finissaient par ne plus s’entendre entre eux. Déjà à son époque ,le rabbin  Samson Raphaël HIRSCH confirmait : «  La tentative collective  d’annihiler , au moyen de la construction de la tour, l’individualité de tout un chacun , fut avortée par la prise de conscience de la valeur particulière de l’individu « . Et « Dès lors, la désunion provoqua l’éclatement de la langue commune  et la dispersion  individuelle des peuples. » Cette  analyse  nous éclaire sur la crise actuelle qui secoue l’Europe. Tels les  bâtisseurs de la tour de BABEL, les chefs des pays membres unissent leurs efforts  mais chacun des Etats a sa vision propre. Selon un autre commentateur, le rabbin  YRMEYYAH,  dans la tour de BABEL «  les gens étaient divisés en 3 groupes «  . Pour ma part, J’ai toujours pensé qu’il n’y avait pas UNE Europe, mais plusieurs blocs distincts, de cultures et de coutumes différentes : le bloc latin ( avec la France, l’Espagne, le Portugal, l’Italie, la Grèce ) , le bloc anglo-saxon ( avec la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Autriche,..) le bloc scandinave (avec la Suède, le Danemark, la Norvège, la Finlande,..)et ainsi de suite avec les nations de l’Europe de l’Est. La religion  aurait pu  constituer un   socle commun  entre des catholiques  ,protestants , orthodoxes, ou juifs, mais  la montée en puissance de l’Islam  bouleverse  ce creuset de valeurs communes existant dans l’esprit  des fondateurs d’une Europe laïque. L’Europe ne peut  se confondre avec l’Orient, d’où un nouvel éclatement qui se profile à l’horizon, Les dissensions se multiplient ,car personne ne  veut être  dominé par son voisin et tous vivent très mal le leadership Paris-Berlin qui s’impose à tous. .Dieu dit «  confondons  là-bas leurs langages de sorte qu’ils ne comprennent pas l’un, le langage de l’autre«  (Noah, XI, 7 ) .Je  me suis souvent demandé si , à Bruxelles, Nicolas Sarkozy comprenait l’allemand ou l’anglais d’Angela  Merkel . Ils se parlent à l’oreille, ils se penchent l’un vers l’autre et  échangent  des remarques Alors, en quoi se parlent-ils ,à travers leur oreillette ? En  français ? en allemand ? ou plutôt en anglais ? La plupart du temps, on se parle mais on ne se comprend pas . Rachi de Troyes ne disait-il pas, à propos des bâtisseurs de la tour de BABEL : «  l’un demande une brique, l’autre lui apporte du mortier  ! » Tôt ou tard, une telle situation  ne peut déboucher que sur des malentendus et des conflits.  Il était dès lors inévitable  de mélanger les langues des hommes, pour que chacun reprenne  sa personnalité  propre. L’ambitieux projet commun disparut alors  pour laisser la place à des perspectives individuelles liées à l’épanouissement de chacun. On peut aujourd’hui, en l’état actuel de la crise , s’interroger objectivement pour savoir si l’Europe, construite à coups de forceps et  se modifiant au fil des traités ,peut encore être viable. L’éditorial  du Figaro «  Sauver l’Europe « à marche forcée » est révélateur des difficultés qu’il y a à maintenir une Europe à 27 ou à 17. Le futur traité qui est en train de s’ébaucher, créant inévitablement   des pertes de souveraineté , connaitra- t-il le même sort que la tour de BABEL .L’avenir proche nous le dira…

 

                                                                                              Moise COHEN

 

                                                               Président d’Honneur du Consistoire de Paris